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8 janvier 2014

[CHRONIQUE] Comètes (Nick Drake - Five Leaves Left , 1969 et Elliott Smith - Figure 8 , 2000)

Five_Leaves_LeftElliott_smith_figure_8_cover

 

 

Chaque discipline, scientifique ou artistique, a eu son lot d’étoiles filantes, génies trop tôt disparus, Evariste Galois (21 ans), Arthur Rimbaud (37 ans)  ou Franz Schubert (31 ans). Dans le petit monde de la pop qui nous intéresse ici, citons Nick Drake (1948-1974) et Elliot Smith (1969-2003).

Le premier, tardivement redécouvert à la fin des années 80 fut l’interprète au tournant des années 60/70 d’un folk pop anglais typique, dans la mouvance de Fairport Convention (dont certains memebres jouent sur ses albums) ou Cat Stevens (ce dernier lui doit probablement beaucoup). Il composa et interpréta trois albums qui peuvent être considérés comme des classiques (Fives Leaves Left, Bryter Later et le sobre Pink Moon). C’est le premier de cette trilogie dont il est question ici.

Quoiqu'il fut dépressif, ce qui touche chez Nick Drake, c’est cette voix apaisante, ces arrangements ouatés sans être tape-à-l’œil, cette atmosphère cosy et intemporelle. Fives Leaves Left contient une poignée de classiques qu’il faut absolument avoir écoutés : River Man, avec son orchestre symphonique au coin du bois, Cello Song, ses percussions et ses volutes de… violoncelle, Fruit Tree, petite symphonie de poche pour cordes et hautbois , avec toujours la guitare folk de Drake et sa technique de picking.

Les autres titres sont tous remarquables, avec en commun des ambiances méditatives, souvent très automnales (mais on peut aussi les écouter par un dimanche pluvieux de printemps, Drake est un poète des intersaisons). Les arrangements sont particulièrement travaillés, mais peut on parler d’arrangement quand l’orchestre , toujours en sourdine, se marie si bien à la six cordes ? Exemple sur Way To Blue (quatuor à cordes),  Thoughts of Mary Jane (traversière bucolique) , Day is Done (violon mélancolique) ou Sunday Sun (piano et vibraphone).

Toujours, chez Drake, des mélodies lumineuses, douces et exotiques, que viennent toujours distordre quelques modulations de style jazz modal, quelques inflexions de voix indianisantes... C'est très contemplatif et surtout très beau.

A l’issue de sa trilogie, Nick Drake avait il tout dit ? Mystère.

Jusqu’à sa mort tragique, Elliott Smith a vécu à LA - qui est d'ailleurs un des titres de Figure 8. A la fin des années 90, on est en plein explosion d’Internet et la Californie est un peu the place to be…L'album sort d'ailleurs sur le label Dreamworks de Steven Spielberg et David Geffen mais on n'est loin d'y trouver un optimisme exubérant : le grunge est passé par là et la voix anxieuse d'Elliott Smith retranscrit plutôt une sorte d'angoisse de fin de siècle...

Tout sur son quatrième album , donne l'impression d'un geek qui aurait digéré tout l’héritage pop californien (des Beach Boys à Buffalo Springfield) pour le transposer avec ses fêlures qu'on devine nombreuses.

Dès l’intro, Son of Sam, on reconnait ce petit truc qui vous prend l'oreille et ne vous la lâche plus, même à la première écoute. C'est d'abord un équilibre parfait de guitare byrdsienne , piano et harmonies vocales avant que les guitares saturés ne sortent du bois. On y retrouve pêle mêle le meilleur Neil Young, qui sait si bien marier ballade folk et énergie électrique, la touche pop beatlesienne en plus. Smith idolâtre en effet les Beatles, et une partie des titres fut enregistré à Abbey Road (on reconnait d'ailleurs le piano du White album, toujours utilisé dans les studios). La voix frêle d'Elliott Smith évoque d'ailleurs tantôt Neil Young tantôt le McCartney de Long,long,long ou la voix dédoublée du Lennon de Love.

S’enchainent ensuite nombre de perles , tantôt folk enlevé (Somebody that I use to know), tantôt honky tonk fuzz urbain (Junk Bond Trader), power pop dans la veine du Big Star (Stupidity Tries) , ou ballade crepusculaire lorgnant vers un Paul Simon (Easy Way Out / Better Be quiet now).

Deux moments particulièrement forts : le mantra mccartnesque et hallucinée "Everything means nothing to me" sur lequel la voix voilée d’Elliot Smith vocalise des montées de gamme avant que n’explose un mellotron sortie de chez King Crimson, et  le parfait Color bars avec une partie de piano aérienne posée sur un orchestre symphonique qui là encore nous renvoie à de grands classiques seventies (Harvest).

Seul petit bémol à ce festival, la longueur du disque : on est en 2000 et les producteurs n’ont pas encore compris qu’il n’est pas indispensable de remplir à ras la capacité d’un CD (16 morceaux pour 52 minutes, d'où une petite poignée de morceaux mineurs). Quoi qu’il en soit, Figure 8 fut bel et bien son chant du cygne, puisqu’à l’issue de l’enregistrement il basculera sur une pente raide et vertigineuse (l’album se clot sur l’instrumental prémonitoire Bye), privant les années 2000 de leur potentiel meilleur songwriter . Il ne fut d’ailleurs pas remplacé.

D'autres chroniques ici :

http://clashdohertyrock.canalblog.com/archives/2010/04/07/17485515.html

http://www.destination-rock.com/albums/album-fiveleavesleft.html

http://sfloman.com/elliottsmith.html#5

Nick Drake - River Man

Nick Drake - Fruit Tree

Elliott Smith - Son of Sam

 Elliott Smith - Everything means nothing to me

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Commentaires
E
A propos de Drake :<br /> <br /> assez d'accord avec la chronique de ce bel album
Répondre
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